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Les meules

Les meules sont des instruments de mouture, traditionnellement en pierre, utilisées dans la fabrication de produits alimentaires secs tels que les farines, le sucre, les végétaux, les épices ou encore des matières animales.

Les meules ont également servi pour le broyage de pigments ou autres minerais. 

Les plus anciennes connues dans notre région sont apparues dès le néolithique ancien et son usage s’est perpétré jusqu’à l’utilisation industrielle des outils métalliques (au cours du XIXe siècle).

Les meules va-et-vient

Les meules dites va-et-vient ont été largement utilisées durant les âges préhistoriques comme l’atteste la présence de nombreuses meules découvertes sur le territoire. A cette période, les meules sont en pierre dure, d’origine locale. Cela peut-être des roches telles que le gneiss, le grès ou la mica schiste. En ce qui nous concerne, on les trouve essentiellement en basalte de par la proximité de la matière première.

Les meules va-et-vient sont composées de deux éléments : la meule dormante constituée d’un monolithe (partie fixe) et la ou les molettes (partie amovible) généralement de petites dimensions pouvant tenir dans la main. Utilisées par percussion posée, usant de mouvements circulaire, ou linéaire d’avant en arrière.

La collection de Jean Saluste issue des prospections et fouilles sur le territoire et plus précisément sur le littoral (Portiragnes/Vias) comprend 56 fragments de meules va-et-vient (conservées et exposées au musée archéologique Jean Saluste de Portiragnes), la grande majorité sont en basalte (Fig.1), quelques meules sont en grès. Parmi lesquelles se trouve celles du site de Pont-de-Roque-Haute confectionnées en basalte local. Ce type de meule domestique est utilisée jusqu’au IIe/Ier siècle avant notre ère.

Fig. 1 Fragments de meules va-et-vient en basalte et grès, collection Jean Saluste (provenance Portiragnes/Vias) © A. Diaz

Le site des Mourguettes est une occupation datée de l’âge du cuivre, composée d’une enceinte de 80m de diamètre en système de fossé-palissade de bois sur la commune de Portiragnes. Une meule va-et-vient en basalte a été découverte lors de la fouille ainsi que de nombreux fragments (Fig.2).

Cette pierre de basalte de forme cubique a été découverte dans la fouille de l’enceinte du site des Mourguettes sur la commune de Portiragnes. On ne connaît pas exactement sa fonction, elle pourrait être en rapport avec le travail de la métallurgie du cuivre dans le traitement des minerais (Fig.3).

Fig.3. Pierre de basalte cubique (outil ?) trouvé dans la fouille du site des Mourguettes (conservé et exposé au musée Jean Saluste de Portiragnes (fouille et © J. Grimal).

Au sein de la maison du patrimoine de Vias, animée par l’association Pavidoc, est conservée une magnifique meule va-et-vient en basalte et sa molette. Cette meule fut découverte dans les années 1990 par Mr Louis Cals, vigneron viassois, à proximité du chemin de la Blanque au nord de la commune de Vias (Fig.4).

Fig.4. meule va-et-vient, Vias (© F.Barnabot).

Textes A.Diaz

Les meules rotatives

Au cœur du IVe siècle avant notre ère, apparaît une évolution capitale dans la confection des meules. Le mouvement linéaire est abandonné au profit du mouvement rotatif.

La meule prend donc une forme arrondie dont la partie mobile (catillus) écrase le grain sur une partie fixe ou dormante (meta) en tournant sur un axe central.

Les premières meules rotatives du bassin méditerranéen apparaissent sur la façade nord orientale de l’Ibérie, spécialement en Catalogne, dans le courant du Ve siècle avant notre ère. Leur diffusion s’effectue d’abord vers le nord, en Languedoc occidental, ensuite d’ouest en est vers le Languedoc oriental puis la Provence.

Plus proche de nous géographiquement, des meules de ce type ont été retrouvées, confectionnées dans le basalte de Bessan/Saint-Thibery et diffusées à partir du IVe siècle avant notre ère. Les meules du Cap d’Agde seront diffusées à partir du IIe siècle avant notre ère (Fig.5).

Fig.5. Reproduction d’une meule rotative en basalte, conservée au GRAA (© J.-M. Melilli).

La collection de Jean Saluste issue des prospections et fouilles sur le territoire et plus précisément sur le littoral (Portiragnes/Vias) comprend 4 fragments de meules rotatives (conservées et exposées au musée archéologique Jean Saluste de Portiragnes) (Fig.6&7).

De nombreuses meules rotatives et fragments de meules ont été découverts lors de prospections sur la commune de Vias. Elles sont conservées et exposées à la Maison du Patrimoine de Vias, animée par l’association Pavidoc (Fig.9,10,11).

Meule de type Pompéien

On trouve ce type de meule en Grèce classique pour broyer le minerai dans les mines du Laurion. Elle se diffusa tardivement dans le mode romain. On en retrouve quelque unes dans le bassin méditerranéen, certaines confectionnées avec le basalte du Cap d’Agde.

La partie dormante est conique vers le haut et la partie mobile a l’aspect d’un sablier dont la moitié inférieure recouvre le sommet conique de la meule gisante. La partie supérieure de la meule mobile sert d’entonnoir et un léger écartement est maintenu entre les deux meules. La meule courante pivote autour d’un axe de bois enfoncé dans la meule dormante (Fig.12).

Ce type de meule, appelées « meules à sang », était actionné soit par des hommes, soit par des animaux; dans ce dernier cas, on parlait de mola jumentaria ou de mola asinaria. Ce type de meule disparaît au Ve siècle de notre ère (Fig.13).

Les gisements

Au cours de la « protohistoire », plusieurs gisements de roches volcaniques ont été exploités pour la production de meules sur le territoire.

Une partie de ses gisements ont été identifiées par la caractérisation même de la roche d’un point de vue pétrographique, et des carrières d’exploitation et de production ont aussi été localisées.

Dans notre région, deux centres de production sont attestés pour la confection de meules : Bessan/Saint-Thibery et le Cap d’Agde

Production de meules à partir de l’extraction et l’exploitation du basalte de la coulée du Cap d’Agde (site d’Embonne) et de la coulée de Saint-Thibery (Fig.14).

Les meules de Bessan/Saint-Thibery dont le centre de production n’a pas été localisé, ont été diffusées sur tout le pourtour méditerranéen.

Ce sont les plus anciennes meules rotatives retrouvées dans des niveaux du IVe siècle avant notre ère à Lattes, dans la moyenne vallée de l’Hérault (La Ramasse), mais aussi, à Martigues et Aix en Provence pour les IIe et Ier siècles avant notre ère.

La confection de meules au Cap d’Agde, n’apparaît qu’au IIe siècle avant notre ère sur le site d’Embonne. Elles sont diffusées, par voie terrestre ou maritime, dans le sud de la Gaule, à l’état d’ébauche ou dans leur état définitif.

Pendant cette période, la production se retrouve en quasi monopole sur le site de Lattes (type rotatif ou plus accessoirement à trémie) dans le proche environnement de Marseille et dans les sites provençaux majeurs du secteur de Martigues, l’oppidum salyen d’Entremont ainsi que dans la ville d’Aix.

Fig. 14 Carte illustrant la diffusion des meules depuis les deux centres de production basés au Sud du territoire : Cap d’Agde et Saint-Thibery (DAO © Céline Gomez).

Textes C. Gomez

Références bibliographiques :

  • AMOURIC H., L’anille et les meules, in : Techniques et économies antiques et médiévales : le temps de l’innovation. Actes du colloque international d’Aix-en-Provence (dir. D. Meeks et D. Garcia), 1997, p. 39-47 (Travaux du Centre Camille Jullian, 21).
  • GILLE Bertrand (dir.), Histoire des techniques, Gallimard, coll. « La Pléiade », 1978.

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