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Bois de Riquet

Le site de plein-air du Bois-de-Riquet, situé sur le plateau de l’Arnet sur la commune de Lézignan-la-Cèbe dans l’Hérault, se trouve au sein d’une ancienne carrière d’exploitation du basalte en activité durant le XXe et le XXIe siècle.

Les premières découvertes remontent à 1985.  Un amateur local constate dans les déblais de la carrière, de restes d’ossements, de dents et de coprolithes (déjections fossilisées). Ces éléments seront observés et expertisés une vingtaine d’années plus tard. Il s’agissait de restes paléontologiques découverts en surface et provenant d’un secteur proche des découvertes de 2008 en stratigraphie.

En 2008, les premières fouilles sont réalisées. Elles témoignent de la richesse exceptionnelle de restes de faune représentée par des grands herbivores et carnivores datant du pléistocène inférieur, piégés dans un sédiment argileux (Fig. 1 et 2). La poursuite des fouilles depuis 2010 a permis de révéler une stratigraphie complexe d’un remplissage d’une cavité ouverte dans un canyon creusé dans une coulée de lave datée de 1.57 Ma, comblée secondairement vers 760.000 ans par une coulée de boue.

Le niveau archéologique US2 du locus 1, qui correspond au remplissage de la cavité, a livré une série lithique intéressante, composée d’éclats, de nucléus d’un outillage confectionné sur éclat ou façonné sur bloc et de percuteurs, associée à des restes de faunes datés aux alentours de -1 million d’années. Cette industrie est caractéristique des plus anciennes industries connues en Europe dites de mode 1 (Orce et Sima del Elefante à Atapuerca en Espagne) et équivalentes à leurs homologues plus anciennes africaines de l’Oldowayen.  

Les restes de faunes évoquent un large spectre : 25 espèces allant du rongeur au grand mammifère. Les équidés et les cervidés sont plus représentés. On y trouve des restes de mammouth, bison, cheval primitif, rhinocéros et grands cervidé (prémegacéros)  (Fig.3.). Également les restes de grands prédateurs comme les hyènes géantes, panthères, loups et ours. La petite faune est aussi bien présente avec des lièvres, taupes, rongeurs, oiseaux et reptiles.

L’Homme était représenté par le type Homo antecessor, considéré comme le plus vieil européen connu à l’ouest de l’Europe. Hormis la présence d’outils en pierres taillés, les actions anthropiques découvertes sur le site se révèlent par des traces de découpe et de fracturation sur os frais. Ces traces témoignent d’activités de boucherie. Pour se nourrir, les Homo antecessor charognaient les carcasses laissés par les carnivores (hyènes) aux abords et dans la cavité. Pour détacher la viande et extraire la moelle, ils utilisaient des galets et roches disponibles dans leur environnement proche.

Un second niveau archéologique, l’US4, correspond à une coulée de boue datée de 0.76 million d’années initiée sur les pentes d’un relief désormais disparu, entrainant des vestiges d’occupations humaines sur son passage et remplissant le canyon et certaines cavités formées dans le basalte. Il a livré une série lithique de type acheuléen ancien, composée d’un riche outillage surblocs et éclats de basalte, de quartz, quartzite ou aplite. Il est en particulier caractérisé par le débitage et le façonnage d’un macro-outillage sur basalte (dits Large Cutting Tools), souvent utilisé en percussion lancée (pour des activités de boucherie ou de coupe de bois) et caractérisant les premières phases de cette période de l’Acheuléen en Europe comme à la Boella en Catalogne.    Ce niveau n’a pas livré de restes osseux, mais « constitue un élément important dans l’enrichissement des connaissances des premières industries acheuléennes en Europe et plus globalement du Paléolithique inférieur Européen » (Bourguignon et al., 2017).

Parallèlement à la fouille du locus 1, les prospections dans le secteur ont mis en évidence un second locus (locus 2) livrant également des restes de faunes et des outils en pierre taillée dans les déblais de carriers. Il s’agit d’une relique du volcanisme ancien, datée de -1.6 million d’années (Fig. 4 et 5).

Au niveau géologique les chercheurs ont mis en évidence, une succession d’éruptions volcaniques (de type strombolien et effusifs) et d’érosions complexes (creusement de chenaux, de gorges, coulée de boue…) qui ont fortement impacté le paysage sous un climat tempéré proche de l’actuel. A l’origine, vers 1.8 Ma .

Le paysage était celui d’une vallée, où coulait une rivière qui se jetait dans le paléo-Hérault après avoir serpenté dans une embouchure herbeuse et boisée. Le paysage actuel résulte d’une inversion de relief qui sculpte une géomorphologie singulière par le déplacement et creusement du fleuve Hérault ainsi que la formation d’une planèze.

En savoir plus

Découvrez la formation géologique du site du Bois-de-Riquet

Une web application, réalisée en collaboration avec le Groupe de Recherche et d’Etude du Patrimoine Archéologique Méditerranéen (GREPAM), permet de remonter le temps et de découvrir le site archéologique du Bois de Riquet de sa formation à sa découverte.

Elle vous permet de déambuler, au cœur de l’ancienne carrière de basalte sur le site de l’Arnet, grâce à des vidéos présentant le contexte géologique de la formation de la cavité, et les espèces animales retrouvées sur le site ; des vues à 360° alliant réalité augmentée et reconstitution 3D ; un jeu permettant de se confronter à des hyènes géantes.

Pour tester cette application, Flashez ce QR Code et plongez-vous dans l’univers du site du Bois-De-Riquet.

ou cliquez sur ce lien : https://bdr.archeodyssee-heraultmediterranee.com/

(Attention cette application est conçue pour fonctionner sur les téléphones portables ou tablettes)

Laurence Bourguignon et al., – Bois-de-Riquet (Lézignan-la-Cèbe, Hérault) : A late Early Pleistocene archaeological occurrence in southern France. Quaternary International 393, 2016, p.24-40.

Laurence Bourguignon et al., – The stone tools from stratigraphical unit 4 of the Bois-De-Riquet site (Lézignan-la-Cèbe, Hérault, France) : A new milestone in the diversity of the European Acheulian. Quaternary International 411, 2016, p.160-181.

Laurence Bourguignon et al., – Bois-de-Riquet, Lézignan-la-Cèbe. Rapport de fouille annuel 2017, SRA Occitanie, 2017, 144 p.